Former : la théorie des "3 verres" …en pédagogie ;-)

Cette approche m’a été expliquée en 1990 par Eric Mire, un collègue, lors de ma formation pédagogique initiale. Elle vient des USA et il s‘agit plus d’une façon illustrée de présenter les choses que d’une théorie.
Elle aide à garder en tête que l’apprenant est en formation pour trouver un emploi, et que cela ne se résume pas à acquérir des compétences techniques.

Au coeur de cette « théorie des 3 verres », on retrouve le principe des « 3 compétences génériques » qui fondent l’employabilité : une personne efficace dans son métier est à la fois bon technicien dans son métier, bon communicant avec les autres et bon gestionnaire de son temps et de ses tâches. 

Ces trois compétences, technique, communication et gestion, doivent être présentes de façon complémentaire et équilibrée.
Pour imager ce principe, on pourrait dire que du point de vue professionnel, une personne équilibrée serait la somme de 3 verres (genre coupe de champagne) contenant à égalité les 3 qualités recherchées : technique, communication et gestion.
Un stagiaire qui arrive en formation est, par définition, en déficit de compétence, au moins sur une des trois qualités.

  • Il sera déjà très à l’aise pour communiquer mais pas trop pour gérer son temps et pas du tout sur le plan technique ; 
  • ou il sera bon gestionnaire de son temps et déjà « techniquement dégrossi », mais pas efficace du tout pour se faire comprendre et « entendre  » ce qu’on lui dit ; 
  • ou encore en déficit sur les trois points à la fois…

Un stagiaire en début de formation a la plupart du temps une coupe déjà à moitié remplie et une coupe ou deux coupes presque vides.
Aucun apprenant n’est fabriqué dans le même moule, ce qui fait qu’un groupe qui démarre une formation est constitué de personnes dont le capital de départ de ces 3 compétences est disparate.
Notre mission de formateur de la formation professionnelle est de faire en sorte que les stagiaires soient prêts, en fin de formation, à s’insérer dans une entreprise lambda, dans un environnement économique et sociale en perpétuelle évolution.
Notre mission n’est pas de former des spécialistes techniquement pointus mais incapables de s’insérer dans un groupe de travail, avec des collègues et des hiérarchiques, incapables de s’organiser pour gérer leurs activités avec un minimum d’autonomie et accomplir leur mission sans stress inutile.
Si notre métier de formateurs de la formation professionnelle est bien d’aider les apprenants à atteindre un niveau suffisant sur ces 3 compétences pour être embauché et réussir dans son poste… nous allons devoir traiter ces trois points, et pas seulement le « geste métier ».
Renforcer le point fort d’un apprenant sans se préoccuper de ses points faibles n’est pas lui rendre service : pourquoi l’aider à dépasser le niveau attendu sur un domaine technique s’il est incapable de s’organiser pour travailler ou de se « vendre » en entretien d’embauche ?
La « théorie » des 3 verres donne aussi un éclairage pragmatique sur ce point : 
elle démontre visuellement que renforcer un point fort demande des efforts peu rentables en regard à ceux qui permettent de traiter un point faible.
Appelons Delta l’écart entre « avant » et « après », en termes de compétences acquise pendant une formation.
Reprenons les 3 verres (du genre coupe de champagne évasée, très large en haut et très étroite au fond)

  • Pour élever d’un centimètre le niveau de champagne dans une coupe presque vide, il faut peu de champagne
  • Pour élever d’un centimètre le niveau de champagne dans une coupe presque pleine, il faut beaucoup de champagne

Transférons à la formation : 
Imaginons que nous formions des serveurs/serveuses de restaurant. Si certains d’entre eux ont atteint un niveau correct en connaissance des vins ou des fromages, les former à l’excellence sur ces sujets va supposer un investissement important en temps et en énergie, autant de la part des stagiaires que du formateur.
Il faudrait beaucoup moins d’énergie et de temps pour les aider à atteindre un niveau correct en organisation ou en communication (écoute, élocution…). 
Faisons en sorte que les stagiaires atteignent le niveau moyen utile sur les trois compétences génériques avant de travailler l’excellence sur l’une d’entre elles !
Que nous ayons cette approche est utile mais ne suffit pas : nous devons faire en sorte que les stagiaires aient eux-mêmes ce regard-là sur leurs objectifs. 
Cela leur éviterait de se travailler comme des malades sur des compétences où ils sont déjà relativement à l’aise en négligeant le travail de leurs points faibles, ce qui est un penchant universellement répandu.
Cette parabole des trois verres est un moyen de re-situer la compétence technique dans l’environnement de l’emploi et de faciliter la concertation sur les objectifs de formation avec les stagiaires.

Vive la pédagogie !
🙂

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