Pédagogie: Pourquoi Twitter et pas Facebook ? (Laurence Juin)

Cet article m’a passionné :
il est au coeur du sujet de l’intégration des réseaux sociaux en pédagogie.
Enseignante, Laurence Juin s’est fait connaître du grand public par son utilisation de Twitter dans un cadre scolaire. Elle explique pourquoi elle a choisi le réseau de micro-blogging plutôt que le très populaire Facebook.
Je me permets de le citer in extenso ci-dessous : en insistant sur l’adresse du blog de Laurence Juin :
Ma onzième année : http://maonziemeannee.wordpress.com/
Merci Laurence

L’article de Laurence Juin Pourquoi Twitter et pas Facebook ? 
Depuis le début de mon expérimentation l’année passée, c’est une question récurrente, qu’elle vienne de mes élèves, de la communauté éducative ou des journalistes.
Pourquoi initier des élèves à un réseau social du Net qu’ils n’utilisent ni ne connaissent même pas ?
Ce serait en effet plus simple de se fondre dans Facebook qu’ils maîtrisent et dont ils usent: aucune initiation nécessaire, adoption immédiate de l’élève. La communication serait immédiate et efficace.


Et pourtant je n’ai pas souhaité utiliser Facebook.
Avant de me tourner vers Twitter, j’ai essayé l’usage hors temps de classe de Facebook avec les élèves de @laderniereannee. J’ai effectivement constaté que la communication est immédiate, partagée et que la motivation des élèves est totale.


L’expérience a duré la période transitoire entre leur année de première et leur année de terminale. J’utilisais alors peu Facebook. Que je sois « amie » avec mes élèves m’a demandé une réflexion sur ce que je voulais mettre comme informations et photos sur mon mur. Moi oui, eux non. À la rentrée, ils ont évoqué de façon informelle une soirée qu’ils venaient de vivre me parlant de leurs tenues. Et j’ai répondu « oui je sais, j’ai vu vos photos sur Facebook ». Ils ont alors réalisé (blêmes !) que j’avais regardé TOUTES leurs photos. Ce soir là, j’ai perdu 28 « amis » sur Facebook …mais notre réseau Twitter a vraiment démarré !


Alors pourquoi Twitter et pas Facebook ?
Les élèves en très grande majorité ont un compte Facebook. C’est leur part de vie privée. Mon statut d’enseignante ne me donne pas accès à cette sphère, elle ne me concerne pas. Y pénétrer c’est faire perdre en partie à l’adolescent son statut d’élève et l’adulte une partie de son statut enseignant. Si l’enseignant a accès à la sphère privée de l’élève, celui-ci peut revendiquer de la même façon un accès à la sphère privée de l’enseignant !L’usage cohérent, selon moi, si l’enseignant veut utiliser ce réseau social avec ses élèves pour une application strictement pédagogique, c’est de créer des comptes strictement «professionnels » enseignant et élèves. L’adhésion des élèves sera peut-être dans ce cas plus difficile car ils s’identifient fortement à leur compte Facebook privé.


Utiliser Twitter permet ainsi d’entrer sur le terrain encore vierge d’un réseau social.
Cette initiation pose les règles sans interférences. Les élèves utilisent beaucoup le Net et Facebook mais sans jamais y avoir été éduqués. Leur usage de Facebook peut être perverti de ces non-règles qui sont devenues des vrais codes de conduite et de communication : les profils ne sont pas protégés, leurs données personnelles sont accessibles à tous, ils postent des photos d’autres personnes sans autorisation préalable, etc.Les initier à un réseau social inconnu, c’est aussi les éduquer à un usage citoyen d’un réseau social : mettre en place des règles, à construire avec eux une réflexion sur leur identité numérique. Au fur et à mesure de cette éducation civique du Net, j’ai vu leurs profils Facebook se modifier, les élèves apprendre à mieux se protéger ou au moins à réfléchir aux informations qu’ils diffusent.Éduquer les élèves à Twitter c’est apprendre aux élèves à réfléchir à leurs usages de Facebook.


Le terme « amis » sur Facebook ne me semble pas adapté à un usage pédagogique.
Je ne suis pas l’amie de mes élèves. Le terme abonnés/abonnements sur Twitter me convient.
Facebook m’apparaît comme un réseau « fermé » : on devient « amis » avec des personnes que l’on connaît a priori. L’abonnement sur Twitter me paraît plus ouvert : ce n’est pas la personne qui est ciblée mais bien ce qu’elle publie sur son mur (exceptions faites à toutes les personnes célèbres : stars, hommes politiques, sportifs). C’est ainsi que le compte classe @laderniereannee a 300 abonnés : non pas pour l’enseignante que je suis mais bien pour ce que je tweete à mes élèves.


Je ne stigmatise pas auprès de mes élèves le « gentil Twitter contre le méchant Facebook ».
Je leur explique que j’utilise les deux mais que mon Facebook, parce qu’en partie privée, est totalement protégé. Je valorise leurs usages de Facebook mais leur indique que Twitter sera un réseau d’utilisation strictement pédagogique pour le groupe-classe et la communauté éducative.
Les règles dictées par la charte d’utilisationprécisent bien : ce n’est pas un tchat, ni un théâtre de discussions à caractère privé.
Les communications sont moins formelles qu’en classe mais gardent toujours une vocation pédagogique, communautaire (je m’adresse de fait à tous mes abonnés) et avec des codes stricts (pas de langage sms).
Par cet article, je ne tends pas à juger négativement les usages pédagogiques que des enseignants peuvent faire avec l’outil Facebook. Et je suis preneuse de toute expérience qui pourrait contre-carrer ce qui n’est que mon avis et pas une vérité établie !

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🙂
Le pied, avec le web, c’est qu’il s’invente tout le temps !

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