
Les IA génératrices bousculent le monde de la formation et de l’enseignement.
Les discussions abondent sur le sujet dans les forums et les blogs.
J’avais réfléchi il y a déjà presque 10 ans à la façon d’évaluer des élèves quand ils avaient accès à des moteurs de recherche : « Evaluer la mise en oeuvre de l’intelligence« , et les IA génératrices et l’accès à Internet ont encore complexifié la question.
J’ai participé à un échange très intéressant sur le sujet ce matin, dans un forum de Moodle.
Un enseignant présentait son désarroi : « l’IA est en train de détruire mon travail produit sur Moodle depuis de nombreuses années, de détruire ma relation pédagogique avec les élèves et de valider la course aux points (avec le minimum d’effort), mise en place par la réforme du lycée.- Lors d’un contrôle Moodle, je suis sur le qui-vive durant tout le contrôle et à chaque fois des élèves (seconde à terminale) réussissent à tricher (ils sont dans des angles morts de ma surveillance avec des écrans quasiment éteins). »
La discussion, aussitôt nourrie par des « moodleurs » expérimentés, a apporté plusieurs points de vue que je vous livre.
- … une des réponses est de demander aux élèves de « faire physiquement ». Plutôt que de répondre à un quiz sur la digestion (ce que doit faire mon petit fils de 12 ans demain), je lui demanderais de dessiner à la main un système digestif. Cela limiterait quand même le fait que l’IA fasse tout à sa place, et même s’il copiait un dessin, il serait en train d’apprendre.
- … demander aux élèves d’évaluer les travaux d’autres élèves, sur une grille de critères, mais avec des arguments. Cela aussi force la mise en oeuvre de l’intelligence
- …rester en veille, partager, proposer aux élèves un challenge : leur demander comment il feraient eux-mêmes s’ils étaient profs …
les téléphones sont déposés par les élèves dans une grande boîte à gâteaux métallique (avec beaucoup de succès sourire), je n’ai donc pas le problème des photos. D’ailleurs les élèves ne sortent pas durant un contrôle de 45 minutes, sauf extrêmement rares exceptions.
Les contrôles « papier » restent tout à fait valables, et ont l’avantage supplémentaire d’apprendre aux élèves à présenter un travail manuscrit. Je ne teste leurs aptitudes que par la méthode de « la mise en pratique » dans leur « bac à sable »*. Donc pas de vrais contrôles, au sens « quizz » du terme. Pas de notes non plus, ni de classements !
Pour terminer, je vous copie-colle cette magnifique réponse de JM Doucet, qui a carrément mis une IA en oeuvre pour trouver des solutions :
Résumé et analyse du message
Points importants
- L’auteur est un enseignant qui utilise Moodle depuis plusieurs années
- Il constate que l’IA facilite la triche lors des contrôles sur Moodle
- Même lors des contrôles sur papier, certains élèves parviennent à tricher en utilisant l’IA
- L’utilisation de SafeExamBrowser est compliquée car les élèves utilisent leurs propres ordinateurs
- L’auteur envisage d’abandonner Moodle et le numérique, malgré son investissement personnel
Questions soulevées
- Comment lutter contre l’utilisation de l’IA pour tricher lors des contrôles sur Moodle?
- Comment « désintégrer » l’IA de l’environnement éducatif plutôt que de l’intégrer?
- Faut-il abandonner les outils numériques comme Moodle face à cette situation?
Réponses proposées
Concernant la triche via l’IA sur Moodle
Repenser l’évaluation: Créer des évaluations qui testent la compréhension, l’analyse critique et l’application des connaissances plutôt que la simple restitution d’informations.
Évaluations en temps limité: Configurer des tests avec un temps très restreint qui rend difficile la consultation de l’IA.
Questions personnalisées: Créer des questions liées au contexte spécifique de la classe, aux discussions qui y ont eu lieu.
Supervision renforcée: Utiliser des configurations de salle permettant une meilleure surveillance des écrans.
Alternatives à l’abandon total du numérique
Approche hybride: Combiner des évaluations numériques pour les entraînements et l’apprentissage, mais revenir aux contrôles sur papier pour les évaluations sommatives.
Intégration encadrée de l’IA: Enseigner l’utilisation éthique de l’IA comme outil d’apprentissage tout en maintenant des évaluations où son usage n’est pas pertinent.
Modalités d’évaluation diversifiées: Développer des présentations orales, des projets collaboratifs, des débats qui permettent d’évaluer des compétences difficilement simulables par l’IA.
Réflexion pédagogique plus large
La situation invite à une réflexion sur les objectifs de l’évaluation dans un monde où l’accès à l’information est immédiat. L’accent pourrait être mis davantage sur le développement de compétences comme l’esprit critique, la créativité et la résolution de problèmes complexes, plutôt que sur la simple restitution de connaissances.